Fraternité


Selon la démarche initiatique qui est la nôtre, la Fraternité est un devoir.

Hors du Temple, dans le monde extérieur, l’amitié procède de choix réciproques et les accointances d’affinités mutuelles. En Loge, la Fraternité se déduit de notre appartenance commune à un Ordre, comme sont indissociables les maillons d’une même chaîne. Nous ne choisissons pas nos Fréres, mais paradoxalement, nous sommes choisis par eux.

En France, la plupart des Loges maçonniques se sont appropriées la devise républicaine « Liberté Egalité Fraternité ». Comme la République elle-même, les trois termes en sont indivisibles…

Comment exercer la Fraternité sans Liberté ? Peut-on concevoir une Fraternité qui s’inscrirait contre l’idéal humaniste visant à instaurer dans les faits une véritable égalité entre les hommes, indépendamment de la naissance et selon leurs mérites ?

Cependant, nous voyons qu’une conception quelque peu élastique de la Fraternité donne parfois lieu à des dérapages, voire à de graves dérives … S’ils sont le fait de quelques Frères indélicats, ils n’en rejaillissent pas moins sur la Franc-Maçonnerie tout entière. Sans doute parce que certains auront confondu tolérance et complaisance, liberté et laxisme, bienveillance et aveuglement.

Il en va ainsi, par exemple, de ces associations paramaçonniques dénommées « fraternelles », où des Frères et des Sœurs se réunissent sur des affinités professionnelles ou autres, excluant du même coup celles et ceux qui ne partageraient pas ces choix. Disons-le tout net : ceci va à l’encontre de la démarche maçonnique et du travail en Loge, qui visent, non pas à séparer en fonction des idées ou sur la base d’affinités électives, mais au contraire à « rassembler ce qui est épars » et à s’enrichir mutuellement de nos différences.

Cela étant précisé, l’entraide fraternelle est une réalité qui se vit au quotidien. Quelque soit l’aide effectuée, elle se fait sans ostentation, car il ne s’agit ni d’enorgueillir celui qui donne ni d’humilier celui qui reçoit. Un réconfort moral est souvent plus efficient qu’une aide financière. (« Aide-toi, le Ciel t’aidera » pourrait être un adage maçonnique) Etant entendu qu’il ne saurait être question d’instaurer une « police de la pensée » ni de mettre en place un quelconque ordre moral… L’égarement d’un Frère peut s’apprécier lorsqu’il s’écarte de la Règle acceptée par tous (indiscrétion, médisance, vanité, etc..).

Tout homme est un Frère, quelque soient sa nationalité, sa religion, son âge, son métier, son orientation sexuelle... A fortiori lorsqu’il est franc-maçon (on pourrait en dire autant des Sœurs). Pour les francs -maçons, la Cité idéale à construire inclue, répétons-le, tous les hommes. Et les francs-maçons sont engagés très souvent dans des associations qui oeuvrent au progrés matériel et moral de l’humanité. Ils sont à l’origine de propositions de loi parlementaires dans les domaines de la Justice, des Droits de la personne, de la bio–éthique, de la fin de vie …

Mais les premiers pas, c’est en Loge que nous les faisons. Là, nous avons un devoir d’écoute bienveillante, sans passion ni préjugé, de parole maîtrisée, d’accompagnement sur le chemin. Devoir de liberté aussi, tant il est vrai que notre engagement est librement consenti.

Il faut que les Fréres éprouvent entre eux un fort sentiment de confiance mutuelle. Et ce sentiment n’est possible que si les Fréres expriment en toute liberté leur enthousiasme mais aussi leurs doutes ou leurs inquiétudes, sans crainte d’être brocardés.

En somme, la Fraternité n’est autre qu’une manifestation de l’Amour dans sa perspective la plus haute, celle qui s’attache à la quête initiatique...